Pour le plaisir de l’intelligence, voici un petit extrait traduit de la chronique du 28/02/2020
Raconter le football
Les commentateurs comme moi craignons toujours d’être obsolètes. Nous faisons donc des efforts pour avoir l’air modernes. Et dans l’application que nous mettons à déceler de nouveaux traits au jeu, nous découvrons souvent des détails insignifiants qui ont pour principal défaut de masquer les questions essentielles. Ou alors nous racontons de vieilles choses avec de nouveaux mots. Ce qu’avant nous appelions pressing bas, au milieu ou haut aujourd’hui on l’appelle bloc haut, médian ou bas. Tout est bloc, comme si une équipe était un ramassis de ciment. Voilà comment on finit par ne plus parler qu’aux entraîneurs, en oubliant que le public est composé de personnes beaucoup plus décontractées. Notre mission est de trouver le nœud du match, d’évoquer l’éventail de talents toujours plus décisifs que les schémas tactiques, ou bien de rendre compte des mouvements telluriques qui produisent les états d’âme. Convoquer l’épopée qui émeut. Humaniser le football et en fin de compte, accepter ses contradictions. En aucun cas le convertir en une question scientifique pour suivre une tendance.
Traduction Thibaud Leplat