Puel « créer un bordel organisé » (2016) 2/2

Suite de la conversation avec Claude Puel publiée dans Football à la française chez Solar. Son équipe a changé, ses traits se sont marqués. Les principes sont toujours les mêmes. 

retrouvailles-a-venir-entre-ben-arfa-et-puel-en-angleterre_212992

D’où vient l’idée de mettre en place le 4-4-2 en losange ? Est-ce pour favoriser un jeu de possession ?

Non, ce n’est pas une question de possession. L’idéal pour la possession c’est plutôt le 4-3-3 pour prendre naturellement la largeur et écarter le jeu. On l’a tenté par rapport à un profil de joueur. J’ai testé Hatem sur un côté, mais pour moi c’était le perdre. Il ne rentrait pas dans cette zone là. Donc je me suis dit qu’on pourrait le développer un peu mieux dans l’axe, un nouveau poste pour lui. On a donc testé le 4-4-2 en losange pendant les matchs de préparation. Voilà ce que j’ai dit aux joueurs « ce n’est pas évident parce qu’il y a beaucoup de contraintes avec ce système mais si on arrive à bien le faire ça peut être sympa. »

Lire la suite

Puel « un entraîneur est là pour donner sans jamais rien attendre en retour » (2016) 1/2

Cette interview est extraite de mon Football à la française, publié chez Solar en 2016. L’arrivée de Claude Puel à Saint-Etienne est l’occasion de revenir sur cette conversation de football organisée dans un petit bureau dans l’ancien centre d’entraînement de l’OGC Nice. Première partie.

claude-puel

C’est d’abord sa voix qu’on entend résonner derrière le grillage du centre d’entraînement de l’OGC Nice. « Faites vivre le ballon !! » hurle-t-il à des gamins recouverts de rouge et noir qui ne gâche jamais une opportunité de faire une passe courte, de bouger dans l’espace. On entend, au bord de ce terrain construit au contre une route trop bruyante et trop encombrée, le bruit des passes qui fusent sur le gazon arrosé, des intérieurs du pieds secs qui claquent contre le ballon toujours joué au sol. 

L’entraîneur de ce club est l’homme en activité qui a le plus d’expérience en Ligue 1 avec plus de 500 matchs sur le banc et autant comme joueur. En 1000 matchs, il a vu donc passé presque trente ans de football français depuis le seul endroit qui compte : le terrain. C’est dire le prix que peut avoir maintenant pour nous une conversation de football avec lui. On y parlera sans doute de Wenger, sa plus grande influence, de Tigana, dont il fut l’adjoint à Monaco, de son amour du jeu et de son goût pour le métier d’entraîneur. 

Mais ce qu’il y a de plus étonnant chez Claude Puel c’est qu’en dépit de ce titre ronflant d’entraineur le plus capé de Ligue 1, il donne toujours l’impression – c’est peut-être sa discrétion ou son sens de la retenue – d’être toujours un jeune entraîneur aux idées nouvelles. C’est le paradoxe de Puel. Après avoir formé un nombre incalculables de joueurs, avoir été le dernier entraîneur à donner un championnat à Monaco (en 2000), avoir fait de Lille autre chose que de la chair à relégable, être le dernier entraîneur français à atteindre une demi-finale de Ligue des Champions (avec Lyon), il a fait maintenant de l’OGC Nice la grande surprise du championnat 2015-2016. Son dernier mérite n’est pas seulement d’avoir hisser un club moyen en première page des journaux mais surtout d’avoir réussi à en faire un modèle de jeu et de formation à la française.

Et si c’était lui le meilleur entraîneur français de ces dix dernières années ?

Derrière son bureau minuscule du vieux centre d’entrainement de l’OGC Nice, il indique poliment au visiteur un siège en face de lui. 

Par où commencer ?

J’ai une idée.

Lire la suite

En attendant Hatem (inédit)

Il n’y a pas que le football dans la vie. Il y a aussi l’art, la vie. Il est heureux, paraît-il, tranquille même. Tant mieux. 

hatem-ben-arfa-match-football-entre-psg-bordeaux-parc-des-princes-paris-1er-octob_exact1024x768_l

Pour comprendre quelque chose à l’obsession, il faut revoir la scène d’ouverture d’Apocalypse Now. Ce que le cœur voit, les yeux l’ignorent. Une forme se dessine devant nous, le visage se penche légèrement. Ce n’est plus un ventilateur que l’on voit tourner au-dessus de nos têtes. Ce n’est plus un mégot de cigarette qui crache cette fumée opaque. Tout à coup, à mesure qu’on se souvient, ce qu’on a devant les yeux ne ressemble plus du tout à ce qu’on a devant les yeux. Ce que les tripes voient c’est tout ce qui manque, tout ce qui dévore de l’intérieur. L’odeur du sang, la moiteur de la jungle dans cette chambre moite. Les palles du ventilateurs sont celles des hélicos survolant la jungle vietnamienne, les bruits des pots d’échappement qui raisonnent à l’extérieur ne sont pas ceux de Saigon mais plutôt des décharges de MPK s’enfonçant tantôt dans un arbre, tantôt dans une jambe. Et cette fumée, ce n’est pas la cigarette. C’est le destin. C’est le Napalm.

Lire la suite